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Entretien avec Clémence Nerbusson, bottier main

Clémence Nerbusson,
bottier main
@CN

Clémence Nerbusson est bottier main. Après avoir créé son entreprise Fleur de Souliers, elle reprend, avec Sophie Brulé, Chaussures de Gatine, une maison ancrée dans son territoire, au savoir-faire reconnu.

Quel est votre métier, Clémence Nerbusson ?

Après une licence de médiation culturelle, j’ai décidé de faire un CAP cordonnier – bottier. Je suis bottier main, avec un savoir-faire qui permet des réaliser des chaussures sur mesure, 100% uniques, depuis la fabrication de la forme, de la semelle, le dessin du modèle et jusqu’à la chaussure finale. Le temps de fabrication est long et les prix à la mesure du temps passé et des savoir-faire mis en œuvre.

Aujourd’hui, avec la reprise des Chaussures de Gatine, je m’inscris davantage dans une production manufacturée, où le savoir-faire, le geste, restent primordiaux mais, avec cette marque, nous ne réalisons plus de créations 100% sur mesure.

Quel est votre métier, Clémence Nerbusson ?

Après une licence de médiation culturelle, j’ai décidé de faire un CAP cordonnier – bottier. Je suis bottier main, avec un savoir-faire qui permet des réaliser des chaussures sur mesure, 100% uniques, depuis la fabrication de la forme, de la semelle, le dessin du modèle et jusqu’à la chaussure finale. Le temps de fabrication est long et les prix à la mesure du temps passé et des savoir-faire mis en œuvre.

Atelier Fleur de Souliers - Clémence Nerbusson
@CN

Aujourd’hui, avec la reprise des Chaussures de Gatine, je m’inscris davantage dans une production manufacturée, où le savoir-faire, le geste, restent primordiaux mais, avec cette marque, nous ne réalisons plus de créations 100% sur mesure.

Quand avez-vous créé votre entreprise ?

Je viens de fêter mes 10 ans d’activité. Créer une entreprise a été un choix de vie. J’avais envie d’être indépendante dans mon activité, et également de vivre là où je le souhaitais. J’ai fait des études à Paris, mais j’ai besoin de vivre en milieu rural. Par ailleurs, si je voulais continuer à exercer ce métier tout en gardant une part d’indépendance créative, il fallait que je le fasse à mon compte.

A la fin de ma formation, en 2011, j’ai créé mon entreprise, une microentreprise devenue depuis SARL. Aujourd’hui, au sein de cette structure, opèrent deux marques de chaussures : Fleur de Souliers et Chaussures de Gatine. Cette dernière est une marque forte et historique, mais qui était en liquidation judiciaire. Nous l’avons reprise pour sauvegarder le savoir-faire et nous sommes fières d’avoir pu conserver trois emplois.

Pouvez-vous estimer le rapport entre le temps que vous accordez à la création, à la fabrication, et celui consacré à la gestion de votre entreprise ?

Lorsque je m’occupais seule de Fleur de Soulier, et compte tenu du fait que la chaussure est un produit saisonnier, j’alternais les périodes consacrées à la création et à la fabrication avec les périodes consacrées à la gestion. C’était à chaque fois un temps spécifique dans l’année, sachant qu’il m’est toujours un peu difficile de sortir de la production.

Depuis la reprise de Chaussures de Gatine, la création a pris d’autres formes. Il s’agit là d’une marque qui fête ses 65 ans cette année, dont les modèles phare, les plus demandés, existent depuis le début de l’activité. Alors, pour moi, le travail de création prend la forme de la réflexion sur la qualité, de l’innovation dans l’outil de travail, de valorisation de l’héritage de la marque, de la recherche de nouveaux fournisseurs, des échanges avec l’équipe … Je dirais que c’est une nouvelle manière d’être créatif, car i faut arriver à se projeter, à sortir la tête du guidon et à emmener ses collaborateurs vers un objectif.

Bien entendu, cela me change du fonctionnement création / gestion par période que j’avais précédemment, mais c’est intéressant et stimulant.

J’ajoute que je ne me serais pas lancée dans la reprise des Chaussures de Gatine si je ne m’étais pas associé avec Sophie. Car je n’avais pas forcément toutes les compétences, ni l’envie de me lancer toute seule dans ce projet de reprise. La partie gestion m’intéresse, à condition qu’elle n’empiète pas sur mon temps consacré à la création et au développement.

Cette association a été motivée par la rencontre même, par l’entente personnelle, mais bien évidemment aussi par la complémentarité des profils. Elle m’a également permis de me renouveler, car j’avais passé cinq ans à prendre en charge toute seule tous les aspects de l’entreprise, de la création au commercial. Or, pour exercer nos métiers, il faut une envie constante et renouvelée. S’associer était une façon de faire évoluer les choses.

Dans votre parcours d’artisan d’art, y a-t-il eu un moment où vous avez été confrontée à un défi, à un cap, dans le développement de votre activité ? Et comment l’avez-vous abordé ?

Oui, arriver à ne plus être tout le temps dans la production a été un cap à passer. J’avais envie de plus de temps consacré à la création, au développement. J’ai besoin du défi, de la nouveauté.

Clémence Nerbusson et Sophie Brulé
@CN

Avec mon associée, nous nous sommes dit que si nous souhaitions continuer, il fallait passer à la seconde. Nous avons donc saisi l’opportunité de reprendre Gatine. Pour un défi, c’est un sacré défi, car l’entreprise était en liquidation.

Un double défi, même, car nous allions changer d’échelle. En plus de nous, les associées, l’entreprise compte aujourd’hui trois CDI et deux apprenties.
Voire un triple défi, car nous sommes désormais responsables d’une maison reconnue dans son domaine, qui a une histoire, qui fait partie du territoire.
ce sont des défis mais, en même temps, ce sont ces défis qui nous ont séduites.

Bien sûr, il a fallu acquérir de nouvelles compétences. Mon associée s’occupe de la vente. Moi, j’ai dû me former à la fois à la gestion de production et à l’utilisation de nouveaux outils, dans un fonctionnement plus structuré.

J’aimerais avoir plus de temps pour apprendre aussi de nouveaux savoir-faire, qui me permettent de mieux me servir de certains outils.

Quel est votre marché aujourd’hui ?

Pour Fleur de Souliers, ce sont essentiellement des particuliers, et nous réfléchissons à l’avenir de cette collection, que je suis la seule à savoir fabriquer aujourd’hui.

Pour Chaussures de Gatine, grâce au réseau de boutiques de chaussures, de cordonniers et aussi des clients du monde forain et de la chasse, nous nous adressons aussi bien à des particuliers qu’à des professionnels. Il faut savoir que, par le passé, lorsque la famille Gilbert a créé l’entreprise après-guerre, les clients historiques étaient les agriculteurs de la région. Les cordonniers, eux, vendent nos créations car ils nous font confiance : ce sont des chaussures fabriquées en France, dont la qualité est reconnue, qui sont réparables et donc durables.

Nous sommes très présents en milieu rural et dans les centre-bourgs, cela est lié à l’histoire de l’entreprise. Nous souhaiterions maintenant développer notre présence en centre-ville des grandes villes.

Quelle est la place de la vente en ligne dans votre démarche commerciale ?

Nous y réfléchissons mais, compte tenu de la diversité de nos modèles, mettre en place une vente en ligne efficace demanderait des moyens et une gestion importante.

Avec le recul, après près de 10 ans d’activité, de quoi êtes-vous le plus fière, le plus heureuse, dans votre parcours ?

D’avoir assumé le choix de l’indépendance. C’est un véritable choix de vie, je me suis lancée jeune, j’ai créé mon entreprise à 22 ans, je n’avais peut-être pas conscience de tout ce que cela impliquait, mais je pense avoir pris les bonnes décisions et, lorsque cela a été nécessaire, d’avoir su m’entourer. Pour se renouveler, et aller de l’avant.

Que répondriez-vous un quelqu’un qui vous dit « je veux faire ce métier, et je veux en vivre » ?

Je lui dirais « vas-y, c’est possible ». Il y a une véritable demande pour des chaussures fabriquées en France, durables, avec des savoir-faire forts. Si on se donne les moyens, si on ne compte pas son temps, si on se forme régulièrement pour renouveler son savoir-faire, ses compétences, il n’y a pas de raison de ne pas y arriver.

Clémence Nerbusson et Sophie Brulé, c’est l’histoire d’une rencontre qui se passe en 2015.
Ce sont deux femmes indépendantes, aux histoires différentes : l’une nait dans une ferme isolée des Deux-Sèvres, tandis que l’autre grandit en région parisienne. Clémence est artisane alors que Sophie travaille dans le conseil aux entreprises.
Mais leurs histoires se ressemblent aussi : elles ont suivi le même cursus universitaire à Paris 3, elles sont toutes les deux entrepreneuses, et elles ont fait le choix d’une vie en milieu rural. Et, surtout, elles ont des valeurs communes et aspirent aux mêmes idéaux.

En 2012, Clémence a créé sa marque de chaussures personnalisables, qu’elle réalise entièrement à la main : Fleur de Souliers.
En 2014, Sophie a créé Co-Iris, une société de conseil aux entreprises pour les accompagner dans des démarches plus respectueuses des hommes et de leur environnement.
C’est en 2018 qu’elles commencent à penser un projet commun : Clémence veut penser autrement sa production et ne plus être seule ; Sophie veut travailler sur des objets concrets, utilitaires.

Les projets de l’une et de l’autre sont nombreux, et cette entreprise commune tarde à émerger mais, à la fin de l’année 2020, lorsqu’elles apprennent que l’entreprise qui fabrique les Chaussures de Gâtine est en liquidation, elles se disent qu’il ne faut pas que ce savoir-faire se perde, que la complémentarité de leurs profils serait un réel atout pour relancer cette marque : Clémence connait bien la chaussure, les fournisseurs de matériaux et les différentes méthodes de fabrication ; Sophie sait structurer une entreprise et mettre en place une politique commerciale efficace.

Elles font donc le pari de la reprise de cette activité qui devient réalité en mars 2021, avec une relance de la production début avril. Depuis, elles vivent et partagent tous les moments de cette aventure avec une équipe au top, en qui elles font une grande confiance et qui les suivent dans leur projet ambitieux !

L'équipe Chaussures de Gatine
@CN